LE PACTE DES RATS.... Printemps 2OO2 . Autobar Usine. Equipe de Week end, en fin de poste.... La journée s'était déroulée tranquillement, lorsque mon règleur, Benoit, vint me prévenir: -" Figure-toi que j'ai vu une grosse bête dans le réfectoire !" A quoi je réponds du talc au talc: -" C'est sûr que tu as vu une grosse bête, tu as dû voir ton reflet dans la vitre !" Eclat de rire, complicité joyeuse entre collègues de travail.... Mais c'est qu'il insiste, Benoit : -" Si, si, je t'assure, je buvais un café quand une grosse bête a traversé devant moi !" . C'est que nous sommes à quelques semaines du 1er Avril, et, devant l'insistance joyeuse de mon règleur, je lui propose de me remplacer afin d'aller voir le phénomène. En chemin, je pense qu'il s'agit d'une blague qui va s'ajouter aux mille et une anecdotes d'usine, lesquelles font l'humanité d'un groupe et l'âme d'une équipe soudée et heureuse de travailler ensemble. Anecdote que l'on se plaira à raconter lors des banquets annuels, ou autour de la table, à l'heure de la pause. Tout en riant d'avance, je me dirige donc vers le lieu indiqué, en prenant soin de ne pas faire de bruit, au cas z.... Tout d'abord, la pièce parait inhabitée, calme, à part quelques fourmis qui sont rentées par la porte ouverte. Il faut dire que c'est une belle journée ensoleillée. J'en suis là de mes considérations météorologiques, lorsque je vois passer, à dix centimètres de mes pieds ébahis une espèce de gros rat débonnaire, qui se déplace avec lenteur , pour disparaitre derrière un distributeur. Ca, pour une grosse bête, c'est une grosse bête ! Un mahouse de rat, à ce qu'il me parait au premier abord, gros comme un chat, gras comme un curé de campagne. Mais à la différence d'un rat, l'animal a le museau plus arrondi, la queue plus courte et le regard sympathique ! (et non le contraire) ! . Curieux ... Et vient l'heure de la sortie, comme dit Sheila ! Je me rends immédiatement au réfectoire, où je croise encore la bête qui promène, indifférente. Dans le couloir, je croise les copines qui s'en vont, et je les invite à venir voir l'évènement. Mais, bien sûr, la bête demeure invisible..... Alors les filles se retirent, non sans m'avoir recopmmandé : -" Si tu la trouves, tu nous la mets de coté pour la semaine prochaine !" Bon. O.K. Tant pis pour moi. J'ai beau leur dire que je l'ai vue, de mes yeux vue,rien à faire pour les convaincre . Je sens bien que ma bonne foi légendaire vient d'en prendre un sacré coup. Mais passons à la capture de la bête, puisque bête il y a ..... C'est à ce moment du récit qu'entrent en scène Théo,, Vincent et Francis... L'instant est presque biblique, quoique je n'ai jamais entendu que Jésus ou l'un de ses apôtres chassèrent le rat ! Ou alors, j'ai du sauter quelques chapitres de l'Evangile... Théo m'envoie dans l'atelier chercher un balai et un carton pendant qu'il est occupé à cerner la bête, qui, morte de peur, s'est réfugiée derrière le frigo. Donc, je vais. En chemin, je croise Vincent et Francis qui arrivent en renfort, l'un avec le sourire entendu de quelqu'un qui n'y croit pas, le deuxième qui rit franchement... Je reviens donc, armée du balai et du carton demandés. Et que la traque commence ! Et je retrouve une vision d'apocalypse ! Je me crois transportée en 1765, en Lozère, et ce sont les gens d'armes de Louis XV qui traquent la Bête du Gévaudan ! ... Enfin, toutes proportions gardées... La Bête, acculée sous le frigo, près du moteur, est en train de vivre ses derniers moments! Elle est déjà à moitié morte; empoisonnée par les granulés de raticide. Elle a la bouche pleine de sang, elle souffle tout ce qu'elle peut .... Les avis fusent : -" C'est un hérisson " nous dit Théo, grand chasseur devant l' Eternel, qui n'a pas bien vu l'animal. -" Dis donc Théo, il y a longtemps que tu n'as pas vu de hérisson ?" lui demande-je ? -" Mais non, c'est un vison ", déclare Francis entre deux éclats de rire . Curieux tableau que ces quatre gorsses bêtes traquant une petite. Je m'émeus, toujours candide : -" Pauvre bête !" -" Quoi, pauvre bête, me dit Théo, tu veux l'amener à la maison ou quoi ? " -" Non, mais on pourrait peut-être la relâcher ? " -" Mais regarde, il est bientôt mort ". Et là, je dois avouer qu'il a raison, Théo. Un petit coup sur le museau plus tard, et la bête gît, empoiso/assommée au fond du carton... C'est ainsi qu'a eu lieu la "capture" de la Bête d'Autobar, hérisson-rat-vison, qui, en définitive, n'était qu'un petit ragondin trop curieux.... Il avait vu de la lumière, et il était rentré dans le monde impitoyable des hommes, rempli de pièges. Même l'oraison funèbre ne fut pas gracieuse: -" Ce sont de sales bêtes, nuisibles, ils mangent la volaille, etc..." Mais las ragondins nous trouvent-ils beaux ou nuisibles, nous les hommes ? J'ai mon idée là-dessus... Petit ragondin, que le Grand Cric te croque, paix à toi dans le Paradis des Ragondins, et.... un souvenir de plus pour nous........ Violette - Avril 2OO2